L’impossible débat
Il faut bien se
rendre à l’évidence : le débat citoyen autour du projet d’aménagement
général (PAG) de la Ville d’Esch n’aura pas vraiment lieu. Lors de la séance de
présentation du PAG à l’Hôtel de Ville, seule une soixantaine de personnes
s’étaient présentées. Il n’y a eu que trois interventions du public dont la
nôtre. La matière est trop complexe, la partie graphique pourtant
magnifiquement présentée par l’urbaniste de la Ville a impressionné mais aussi
dépassé toute personne qui n’avait pas préalablement étudie la matière en
profondeur. A l’issue de la phase de réclamation qui se termine le PAG passera
donc très probablement le premier vote du conseil communal comme une lettre à
la poste.
Je vais donc
continuer brièvement l’analyse critique en y intégrant certaines questions
d’actualité.
La forme et le contenu de la
politique de construction de logements
Le PAG distingue –
pour simplifier – deux sortes de constructions de logement et certaines zones
mixtes, zones de bâtiments publics, en tout une vingtaine de zones définies
selon leur affectation. Les zones de logements proprement dites se divisent en
« hab1 » pour les maisons particulières familiales et en
« hab2 » pour le logement en élévation. L’outil du PAG n’introduit
pas de critères sociaux, comme par exemple des zones de logement locatif
abordable, qui est pourtant la priorité affichée du gouvernement…à vérifier si
l’affiche dit vrai. Il n’est d’ailleurs pas évident de créer des
« zones » de logement locatif abordable qui risqueraient de devenir
des zones stigmatisées. Il faudrait plutôt garantir une bonne mixité.
La mixité prônée
par la majorité noire-verte-bleue est exactement la même que celle de
l’ancienne majorité social-démocrate – verte : il s’agit d’attirer les
« classes moyennes supérieures » et de repousser les « classes
moyennes inférieures ». Un autre terme pour cette vision démographique est
« gentrification ». On l’a vu lors du débat sur le PAP de la lentille
Terre Rouge (roud Lëns ).
La mobilité et les visions
d’avenir
Les visions
d’avenir ne sont pas exactement l’objectif du cadre légal imposé à
l’établissement des PAG. Il s’agit plutôt de fixer le droit de construction par
zone ce qui touche évidemment le présent et l’avenir. Les concepteurs du projet
de PAG eschois ont cependant réussi à introduire certaines visions surtout en
incluant des « couloirs ». Cela tranche avec la sémantique en
allemand du plan d’aménagement général :
« Flächennutzungsplan ». Un couloir n’est pas une « Fläche ».
Ainsi peut-on apercevoir partout dans la partie graphique des couloirs de
mobilité douce certes un peu vagues mais suffisamment affirmés pour qu’on
puisse s’y référer à l’avenir. C’est un grand progrès. Lors d’une très récente
modification du PAP du nouvel hôpital à construire, on a même introduit un
couloir le long du ruisseau Dipbach qui prend l’allure d’une « coulée
verte ». Relevons encore en matière de vision d’avenir qu’il n’existe plus
de zones à étude (donc indéfinies) mais que désormais tout le territoire est
« zoné »…sauf évidemment les « terrae incognitae » que sont
Arbed-Esch-Schifflange et le crassier Terre Rouge, mais ce ne sont que des
broutilles !
Un processus participatif à
Arbed-Esch-Schifflange (AES)
En ce moment,
l’Agora qui commence à développer le site d’AES a lancé un processus de
participation citoyenne au développement de cette friche. Le succès est
supérieur à la séance d’audition du public pour le PAG. La participation des
gens de Schifflange semble au moins aussi vive que celle des Eschoises et
Eschois. C’est vrai qu’ils ont toujours considéré cette usine comme étant la
leur bien qu’elle se trouve à 9/10èmes sur le territoire d’Esch. Le désir de
participation populaire de la part de l’Agora n’est pas une simple illusion.
Les concepteurs ont besoin de cet écho. Plus tard, c’est le processus de
décision qui comptera : 15 représentants du propriétaire Arcelor-Mittal,
15 d’Agora, 15 indépendants et 3 représentants communaux (2 d’Esch 2 de
Schifflange ) décideront de la voie à suivre. C’est du moins ce qu’a
annoncé le concepteur en chef d’Agora dans une interview au tageblatt. La
privatisation du développement urbain ! Ah, qu’elles étaient belles les
temps anciens où l’oncle Stübben dessinait les plans de développement d’Esch
avec comme seul interlocuteur les responsables communaux élus. C’était dans les
années 1920 et l’oncle est mort et enterré depuis longtemps.
Martin de la Tour
Il y avait une
fois un projet de construction d’une belle tour Boulevard Prince Henri. Il y
eut une réunion publique dans le quartier plutôt favorable au projet. Une
deuxième réunion fut défavorable. L’avis de la commission consultative du
développement urbain était favorable. Mais la mairesse Vera Spautz décida de retirer
le projet et de présenter un plan B plus modéré et traditionnel. La nouvelle
majorité droite-verte fit adopter le plan B par le conseil communal. Quelques
mois après, la tour réapparut et figura à l’ordre du jour du conseil communal
du 29 mars 2019 sous la forme de modification du PAP accompagnée d’une avis
très négatif et idéologiquement conservatrice de la cellule d’évaluation du
Ministère de l’intérieur et d’un autre avis indécis de la commission du
développement urbain. De mauvaises langues prétendent que certains membres de
la majorité voulaient voter contre la tour. Une crise de la coalition guettait.
Martin Kox, l’échevin vert en charge du dossier était sous pression. Encore un
retrait ? Quelle ne fût pas la surprise le 29 mai lorsqu’on annonça que le
promoteur avait retiré le projet. Notez bien : le promoteur, pas Martin,
nooon ! Honnis soient ceux qui soupçonnent une grosse magouille.
(31.3.2019)
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