Mittwoch, 17. Juli 2019

Quelle sera la nature de la récession à venir ?


Toute récession est une crise de surproduction. Le capitalisme a dans sa nature un fonctionnement cyclique qui se décline par la dépression - le tournant vers la reprise économique - le boom et la prospérité – le krach et le tournant vers la dépression. C’est un processus qui se répète inlassablement depuis des siècles. Les raisons de cette cyclicité ainsi que d’autres cycles plus longs qui font l’objet de débats contradictoires parmi les économistes ne sont pas traitées ici. Les cycles courts sont nettement définissables tout au long de l’histoire. Ils durent en moyenne et le plus souvent environ 8 ans avec des écarts possibles de 5 à 12 ans.

Le mouvement cyclique se passe soit dans une économie nationale déterminée avec d’autres dates dans d’autres économies ; il est parfois généralisé dans l’économie mondiale, soit et le plus souvent généralisé par groupes d’économies nationales.


La dernière récession – un peu oubliée d’ailleurs et pourtant c’était elle qui avait incité le gouvernement luxembourgeois à prendre un départ avec une politique de contre-réformes rectifiée rapidement par la suite – avait lieu en 2012 et touchait l’Europe, le Japon et certains pays émergents mais pas les Etats-Unis. Les USA n’ont pas connu de récession depuis la grande crise financière de 2007-2008, qui avait plus d’un grand krach comme celui de 1929 que d’une récession « régulière ». Il est de convention de dire qu’une économie est en récession lorsqu’elle est régressive pendant trois trimestres consécutifs.

Il est important de noter que la récession a un effet régulateur sur l’économie, même s’il s’agit d’une régulation brutale, d’une saignée forte : des centaines de milliards sont détruits, mais les bulles financières sont éliminées ou réduites.

Pourquoi cette interrogation ?

Puisque les récessions sont des phénomènes inéluctables de l’économie capitaliste pourquoi se soucier de sa nature ? Le moment exact de son début n’est pas le sujet ici, il ne s’agit pas de faire des pronostics. Evaluer le degré probable de sa généralisation serait déjà plus intéressant. Il y a différentes raisons à se poser des questions sur les conditions spécifiques dans lesquelles évaluera la prochaine dépression.

1.   D’abord, les conséquences de la grande crise financière de 2007-2008 n’ont pas disparu. L’augmentation de la productivité du travail est restée faible, celle de la croissance aussi, sauf aux Etats Unis. Les profits se sont rétablis, mais sont peu réinvestis et beaucoup orientés vers la spéculation. Le chômage a baissé sensiblement, en partie relayé par la précarité, mais les salaires ne décollent pas. Alors que les bourses jubilent pendant ce 1er semestre 2019, le sentiment d’insécurité est général. C’est paradoxal. On cite un comte qui se serait exclamé juste avant la révolution de juillet 1830 lors d’une réception offerte au roi de Naples : « C’est une fête toute napolitaine. Nous dansons sur un volcan.» Il n’est cependant pas aujourd’hui question de révolution, mais éventuellement d’éruption.

Les dettes accumulées au niveau mondial (dettes publiques, d’entreprises, privées) atteignent désormais 300% du PIB mondial. La « politique du taux 0 » de la banque centrale européenne continue alors que les objectifs d’élever l’inflation à 2% ne sont pas atteints ; aux Etats-Unis l’élévation douce des taux a été annulée de nouveau. Il n’est pas évident que les objectifs du « quantitative easing » (QE) poursuivis par les banques centrales (livrer des crédits presque gratuits aux banques pour les empêcher de se limiter à la spéculation et au rachat des dettes publiques) pourront continuer encore longtemps. La Banque centrale européenne a déjà réduit le QE. Il s’agit en fait de création de monnaie par la planche à billets. Les importants profits accumulés sous l’effet de la politique néolibérale ne sont pas investis dans l’économie réelle, mais servent à la spéculation et à l’enrichissement…Certains pays importants ne sont jamais sortis de la récession comme l’Italie et des grands pays d’Amérique latine.

2.   Bien des économistes supposent que l’économie capitaliste - européenne au moins – se « japonise »- à savoir est entrée dans une phase de « stagnation séculaire ». J’avais traité la possibilité de la « stagnation séculaire » dans d’autres articles. Elle n’est pas traitée ici.

3.   On ne voit pas quelle avancée technologique pourrait inciter à des investissements massifs. Les innovations de la 3e révolution industrielle (digitalisation, intelligence artificielle ou électrification des transports et des voitures) ne sont pas de nature à engager des sommes comparables aux précédentes révolutions industrielles (l’apparition du chemin de fer, l’électrification). Un exemple frappant : les nouvelles voitures électriques sont plus simples de construction que les anciennes ; elles comportent moins de pièces et devraient être moins chères à moyenne échéance.

4.     Les marchés des marchandises et services sont de plus en plus déstabilisés par la guerre douanière déclenchée par l’administration Trump et que se livrent les grands centres économiques.

5.   On ne voit pas comment les Etats nationaux pourront encore une fois soutenir les banques « too big to fail », vu le niveau d’endettement de ces Etats, dont une partie n’a jamais réussi à résorber les déficits. Il est douteux que mécanismes de secours installés par l’Union Européenne (Union des Banques,…) soient assez fournis pour permettre d’éviter l’écroulement possible des grandes banques.

Cette liste n’est pas complète. Elle est aussi trop générale. Des doutes sont permis sur la lourdeur présumée de la récession à venir. Le petite énumération qui précède révèle cependant les très nombreuses faiblesses de l’économie mondiale au soir d’une crise probable.

Les 4 grands pôles

Les grands pôles de l’économie capitaliste d’après-guerre, USA, Europe, Japon on été rejoints par la Chine, qui sera probablement la 1ère économie mondiale dans quelques années.

Etats-Unis : La réforme fiscale de Trump en faveur des entreprises est vivement critiquée par une majorité d’économistes puisqu’elle intervient à un moment où l’économie étasunienne n’en avait absolument pas besoin. Elle est probablement motivée pas des considérations aussi bien clientèlistes qu’électorales. Les superprofits engendrés par la réforme fiscale ont eu un effet bref d’impulsion à l’économie. Depuis, ils nourrissent la surproduction de capital rentier. La dette de l’Etat central et de certains Etats explose mais est pour le moment facilement financée par les fuites de capitaux entre autre des pays émergents vers les bonds du trésor américain. Est-ce que cela va durer ? La récession américaine est en retard. Les polémiques entre Trump et la Fed sont pour le moment sans objet puisque la FED vient de stopper par précaution les augmentations des taux de base.

Chine : En Chine on ne peut pas parler de récession dans la mesure où des croissances autour de 6% ne peuvent pas facilement évoluer vers des chiffres rouges. Une explosion de bulles de surendettement n’est pas à exclure. L’Etat central est endetté à 5.200 milliards de dollars, mais s’y ajoutent les ténébreuses dettes des gouvernements locaux qu’on soupçonne énormes. La réorientation vers le marché intérieur est accouplée à une orientation à longue vue vers les nouvelles routes commerciales par terre et par mer, la colonisation en Afrique et l’incrustation dans certains secteurs de l’économie européenne, notamment les terminaux des destinations commerciales (ports et aéroports). La « 3e révolution industrielle» en Chine est à la pointe mondiale (électrification du transport routier, cellules de batteries, photovoltaïque).

Europe : C’est le pôle qui est le plus concerné par le questionnement sur « le stagnation séculaire » (après le Japon où elle est endémique, s’entend). Elle est largement dominée par la santé de l’économique de l’Allemagne qui est basée sur l’exportation de sa puissante industrie. Pour protéger les exportations on y freine la consommation intérieure par la modération des salaires et des retraites minimales suivant le mot d’ordre « Geiz ist geil !» (sauf concernant la consommation de grosses cylindrées par les couches moyennes supérieures). 1/3 de la production industrielle européenne (UE) est allemande. Or des trois exportations majeures de l’Allemagne, les machines-outils, la chimie et les automobiles, deux risquent d’être en difficultés : les grosses voitures à cause du relèvement des frais de douane et la chimie à cause de mauvaises stratégies. Vue sa position dominante en Europe, l’effet une éventuelle récession en Allemagne sur l’ensemble de l’UE seraient inévitables. Le ciel s’assombrit sur l’économie Allemande: recul des exportations de voitures, crise des deux géants de la chimie BASF et Bayer, déficits records de la Deutsche Bank qui se sépare de son « industrie de fonds » et de 18.000 emplois.…

Les nominations nouvelles aux postes-clés de l’Union Européenne n’augurent rien de bon quant à un changement d’orientation de la politique d’intégration européenne avec un maintient probable de la primauté de la rigueur budgétaire et les faibles avancées dans la création de budgets opérationnels pour la commission et la zone euro.

L’Italie est en situation de récession jamais résorbée depuis la crise de 2007-2008, raison principale de l’avancée de l’extrême droite.
Il ne faudrait pas sous-estimer les avancées dans la stabilisation des systèmes financiers de la commission Juncker. (100.000 € assurés pour les dépôts ; Union bancaire ; supervision macro-prudentielle et micro-prudentielle ; comité européen du risque systémique ;…) Malgré tout les doutes sont permis quant à leur capacité de maîtriser une crise majeure ce d’autant plus que les Etats nationaux ne pourront pas réagir comme après 2008.

Japon : L’orientation économique du Japon diffère largement de celle de ses concurrents. On pourrait dire qu’elle est la plus néo-keynesienne en liaison avec des spécificités typiquement nationales comme le super-ministère de l’économie, qui intervient fortement et la captation de l’épargne intérieure par les bons du trésor qui couvrent une dette étatique d’environ 240% du PIB, chose unique dans le monde.
Le Japon accuse une croissance faible et une inflation quasi inexistante. La productivité du travail et de loin la plus mauvaise des pays industrialisés ce qui peut sembler surprenant pour la 3e économie nationale mondiale (nettement devant l’Allemagne). C’est pourtant le pays où la robotisation est la plus avancée. Le gros problème de l’économie japonaise est probablement la mauvaise démographie et la quasi inexistence de l’immigration.

***

Ces notes sur la récession présumée à venir se limitent à la logique interne du système économique qui domine toute l’humanité. Ce système ne peut vivre qu’avec la course à la croissance. La limitation objective des ressources naturelles, l’état alarmant du climat et de l’extinction des espèces va à l’encontre de la dynamique intrinsèque du capitalisme. La question de la croissance impossible sera et est déjà la question centrale. En attendant, le système dominant peut encore causer bien du mal à l’humanité, même jusqu’à le barbarie. Pour éviter cela, il est entre autre nécessaire d’analyser la logique interne du système toujours dominant.


15.7.2019



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